Sapporo 1972 : Le fait
Le fait
Schranz paie la note
Quatre ans plus tôt à Grenoble, un premier bras de fer avait opposé les skieurs à Avery Brundage. Le président du CIO leur reprochait d'être des professionnels déguisés et avait refusé de participer aux cérémonies de remise des médailles de l'alpin. Aux Jeux de Sapporo, M. Brundage (photo), qui s'apprête à quitter son poste, va livrer un dernier combat. Ce combat fera une victime de marque : Karl Schranz.
Depuis quelques semaines, le ton est monté entre le virulent octogénaire et l'idole de toute l'Autriche, vedette annoncée des Jeux de Sapporo. Pour ses compatriotes en effet, nul doute que Schranz va enfin gagner la médaille d'or olympique qui manque à son brillant palmarès.
M. Brundage (photo) a déclenché les hostilités en dénonçant, dans un courrier au président de la Fédération Internationale de ski Mark Hodler, une dizaine de skieurs de premier plan, estimant qu'ils doivent être exclus pour non respect des règles d'amateurisme en vigueur aux JO. Au total, il cite une quarantaine de skieurs ayant des contrats commerciaux.
La FIS n'apprécie pas : elle menace de quitter les Jeux et de tenir des Championnats du monde à Sapporo. C'est la crise au CIO, dont certains membres ne ménagent pas leurs critiques à l'encontre de leur président.
Brundage vainqueur 28 à 14
Schranz est l'une des principales cibles de M. Brundage. A 33 ans, il a tout gagné sauf les Jeux et il est considéré comme l'un des plus grands skieurs de l'histoire. D'origine modeste, ce fils d'un ouvrier des chemins de fer est riche. Certains affirment qu'il perçoit 50.000 dollars par an des fabricants de skis pour tester leur matériel.
Se croyant intouchable, Schranz critique vivement M. Brundage, lui reprochant de vouloir faire des Jeux pour les riches et estimant qu'il a un siècle de retard.
C'est la partie de bras de fer. A trois jours des Jeux, M. Brundage convoque la commission d'éligibilité, qui exclut l'Autrichien par 28 voix contre 14, notamment pour s'être livré à des opérations publicitaires. Le président du CIO a gagné.
Choqués, les Autrichiens envisagent de retirer leurs skieurs. Schranz (photo 1, à droite) les convainc de n'en rien faire. Il veut être la seule victime. Il le sera, et tous ses collègues de l'alpin pourront concourir sans problème.
Disqualifié du slalom de Grenoble, exclu des Jeux de Sapporo, Karl Schranz (photo 2, centre) ne sera jamais champion olympique.
A son retour à Vienne (photo 3), où l'ambassade américaine a connu manifestations et alertes à la bombe, il est acclamé par 100.000 personnes. En 1988, le CIO lui décernera une médaille symbolique de participant aux JO de Sapporo. Maigre consolation !
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